MORONI, Comores : L’archipel des Comores dans l’océan Indien exhorte la France à se retirer d’une opération imminente qui pourrait entraîner le retour forcé de migrants clandestins depuis l’île française voisine de Mayotte.
Les autorités de Mayotte devraient lancer l’opération Wuambushu (« Reprendre ») le 20 avril, après la fin du Ramadan.
Son objectif est d’éloigner les migrants illégaux installés dans les bidonvilles de Mayotte et de renvoyer les sans-papiers vers l’île comorienne d’Anjouan, située à 70 kilomètres de là.
L’opération a été approuvée par le président français Emmanuel Macron en février.
“Nous recommandons fortement à la France d’abandonner l’opération Wuambushu”, a déclaré mardi le porte-parole du gouvernement des Comores, Houmed Msaidie.
Le gouverneur d’Anjouan, Anissi Chamsidine, a déclaré que l’île était incapable de « faire face aux violences créées depuis Mayotte par l’État français ».
Le président des Comores, Azali Assoumani, qui est actuellement en visite en Arabie Saoudite, a déclaré la semaine dernière à l’AFP qu’il espérait que le projet soit abandonné, mais a reconnu qu’il lui manquait “les moyens d’arrêter l’opération par la force”.
Le 18 mars, Macron, lors d’un appel téléphonique avec Assoumani, a exprimé « son inquiétude concernant la situation sociale et sécuritaire à Mayotte », selon un communiqué du palais présidentiel français.
Mayotte et les trois îles des Comores actuelles étaient des territoires français jusqu’en 1975.
À la suite d’un référendum, trois îles — la Grande Comore, Mohéli et Anjouan — se sont déclarées comme un pays distinct, l’Union des Comores.
Mais Mayotte a voté pour rester un territoire français d’outre-mer et est ensuite devenue un département français – un statut rejeté par les Comores, qui continuent de revendiquer l’île.
Mayotte est le département le plus pauvre de France avec environ 80 pour cent de la population vivant sous le seuil de pauvreté et des niveaux élevés de délinquance sociale.
Mais il bénéficie également du soutien des infrastructures et du bien-être français, ce qui a provoqué un afflux de migrants en provenance des Comores, de nombreux migrants tentant la traversée dangereuse sur des bateaux branlants utilisés par les passeurs.
On estime qu’environ la moitié des quelque 300 000 habitants de Mayotte sont étrangers, pour la plupart Comoriens.
En 2019, la France a intensifié ses efforts pour endiguer ce flux, en renforçant les patrouilles maritimes appuyées par la surveillance aérienne.
En 2022, ces moyens ont facilité l’interception de 571 bateaux transportant 8 000 migrants. Au total, 25 380 personnes ont été expulsées l’année dernière, principalement vers les Comores.
Le 5 avril, des groupes de la société civile des Comores ont averti que l’opération Wuambushu était un « massacre imminent » et ont exhorté les organisations internationales à intervenir.
Des personnalités mahoraises se sont également prononcées, notamment Jean-Marie Burguburu, président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme.
Il a écrit à Gérald Darmanin, ministre français de l’Intérieur et des Territoires d’outre-mer, pour lui dire que la répression risquait « d’aggraver les tensions et les divisions sociales dans un contexte déjà très fragile ».
Des « expulsions massives » porteraient également « atteinte au respect des droits fondamentaux des étrangers », a-t-il déclaré.
Source : Arab News